Le 17 juin, la Fondation Heinrich Böll a organisé, en partenariat avec l’Université Paris II – Panthéon Assas, un débat tri-national autour des élections européennes de mai 2019. Tenue dans la Salle des Actes de l’Université, cette conférence en anglais et en français vient conclure deux journées de « trilogue » sur l’avenir de l’Europe et le renforcement de la coopération franco-germano-polonaise.
Le 17 juin, la Fondation Heinrich Böll a organisé, en partenariat avec l’Université Paris II – Panthéon Assas, un débat tri-national autour des élections européennes de mai 2019. Tenue dans la Salle des Actes de l’Université, cette conférence en anglais et en français vient conclure deux journées de « trilogue » sur l’avenir de l’Europe et le renforcement de la coopération franco-germano-polonaise.
Le panel très diversifié rassemble des acteurs politiques – Frédéric Petit, député MODEM des français hors de France, et Anna Deparnay-Grunenberg, députée européenne des Verts allemands – ainsi que chercheurs et universitaires – Agnieszka Cianciara de L’institut d’études politiques de Varsovie, Lucas Guttenberg, directeur adjoint de l’Institut Jacques Delors, et Ellen Ueberschär, présidente de la Fondation Heinrich Böll. Le débat est modéré par la professeure de Sciences Politique Sylvie Strudel, spécialisée dans les questions européennes.
Devant un parterre d’étudiants attentifs, Ellen Überschär souligne, en guise d’introduction, le rôle crucial qu’a joué la jeune génération dans les dernières élections européennes. On lui doit en grande partie la hausse de la participation dans tous les pays, la poussée des Verts et l’émergence dans le débat public des thèmes sociaux et écologiques grâce aux mobilisations civiles comme les « Fridays for Future ». Le succès de ces élections reste cependant relatif car on a pu observer l’entrée au Parlement de partis eurosceptiques, représentant pour certains d’entre eux une véritable menace pour le projet Européen. Une recomposition du paysage politique qui aura un impact aussi bien au niveau national qu’européen.
La table-ronde s’ouvre sur un premier constat : pendant toute la campagne, les élections européennes ont largement été présentées comme des élections de seconde zone, où les enjeux européens ont été éclipsés par des problématiques nationales. Pour les participants cependant, la réalité s’avère bien plus nuancée. Dans de nombreux pays, les enjeux nationaux ont certes été cruciaux : en France, la préparation des élections municipales de 2020 a sous-tendu la campagne. En Pologne, le parti gouvernemental PiS a choisi de focaliser le débat sur la question éminemment nationale des aides sociales, ce qui lui a permis d’obtenir près de 45% des voix. En Allemagne, le vote est venu sanctionner la « Grosse Koalition » (Socialistes et Chrétiens démocrates), pilier du paysage politique allemand depuis des années. Mais cette dernière élection n’en est pas secondaire pour autant. De l’avis des invités, elle représente même peut-être, paradoxalement, la première élection réellement européenne : dans les trois pays, le taux de participation a en effet connu une hausse significative, témoignant d’un réel intérêt pour la question européenne, notamment chez les plus jeunes. Un intérêt soutenu par de nombreux médias qui, pour la première fois, se sont penchés sur le fonctionnement du Parlement Européen et sur le déroulement des élections dans les pays voisins. Dans le débat public, les thèmes résolument européens comme le climat, la justice sociale ou la transition énergétique sont également devenus incontournables. En Allemagne, un sondage a d’ailleurs montré que 60% des sondés voteraient en fonction des questions européennes plutôt que nationales. Par ailleurs, le choc du Brexit, la montée des populismes et la multiplication des violations des principes fondamentaux européens dans certains pays ne sont certainement pas étrangers au regain d’intérêt pour les élections européennes. En tout cas, tous les intervenants constatent que les élections ont oscillé entre enjeux nationaux et européens. Sans aucun doute, une évolution.
Second constat : les élections de mai 2019 ont donné lieu à une importante reconfiguration du paysage parlementaire européen. Avec la déroute des socialistes et républicains français, le relatif échec de la coalition allemande, et l’arrivée en force des députés verts, le Parlement apparaît désormais très fragmenté. Comment va-t-il pouvoir construire une majorité ? Un des cas les plus complexes est certainement celui du PiS. Malgré ses 27 mandats européens, le parti gouvernemental polonais a une marge de manœuvre extrêmement réduite : il fait partie du groupe ECR, pris en étau entre les conservateurs du PPE et l’extrême-droite. Lorsque le Brexit aura contraint les conservateurs britanniques, également membres de l’ECR, à quitter le Parlement, les députés du PiS se retrouveront particulièrement isolés. Toutefois, comme le souligne le député Frédéric Petit, le Parlement Européen reste une institution efficace. Son bon fonctionnement ne devrait pas être enrayé par sa nouvelle composition. Le véritable enjeu, au delà de la constitution de groupes parlementaires, sera plutôt de trouver des réponses aux crises de l’époque telles qu’elles ont été énoncées par les électeurs.
Les questions du public suivent, sur des thèmes aussi variés que la politique culturelle européenne, la mobilisation citoyenne, ou la différence entre les Verts allemands et autrichiens. Enfin, intervenants et étudiants se retrouvent autour d’un verre offert par la Fondation Böll pour des discussions informelles et animées, qui se poursuivront tard dans la nuit.